mercredi 3 juin 2009


Quand la conscience s'éveille

La nuit tombe. Mes yeux se pelaudent pour rester éveillé. Ma tête semble très encombrée, mon corps, inexistant. Insolite… Les bras de Morphée m’appellent. Je veux m’y lover, m’y nourrir de tendresse. Fumisterie. Là-haut, dans mes cerveaux, vit un monstre difficile à déloger. 50 ans qu’il crèche dans son cruel nid d’amour. Un monstre qui m’a voué une admiration sans bornes. Qui a tissé ma vie. Anesthésiée. Qui m’a sauvé aussi, mais je ne me damnerais pas pour lui

Insomnies, interminables nuits… Je vous maudis.

1er juin 2009. 3h11. Mes paupières se lèvent. Dans 3 minutes à peine, 1er juin 1959, nait un bébé de 3K600. MOI. Sylvie. Après 9 mois passés dans un univers sombre, esseulée, explosif, dans une eau polluée d’une mémoire de gestation dramatique, mon frère, des chocs vécus par ma mère, transmise à mes cellules, mon eau, j’ouvre les yeux avec difficulté sur un monde inconnu. La vie.

Hier, fin de journée, je me retrouve sur le quai d’une gare de banlieue dans le vide le plus total. Paumée, comme parachutée dans un monde d’interdits.
Je viens de fêter mon entrée dans le demi-siècle chez des amis. J’suis quinqua. Le temps est aux merguez grillées, aux bulles, aux coups de soleil, aux rires… Amitié de plusieurs années retrouvées, merci pour ce moment de pur bonheur. Le quotidien se réveille. Fin de journée cramée. Il est l’heure de récupérer les enfants. Je me retrouve face à un choix délicat. Rester me lover, ou prendre le chemin du retour. Antoine m’attend. JE décide qu’il m’attend. On me demande de rester. Je décide de rentrer. Pas compliquée la nana. On me raccompagne à la gare. On se dit au revoir. Je passe le tourniquet, j’avance dans une clair cécité . Je me retourne. On se fait signe. Je souris. Vite, j’dois pas rater l’train. Je file. Merde !!! L’escalator est en panne. C’est haut. J’aperçois le ciel. Gris. J’comprends pas. D’en bas, c’était bleu. J’prends machinalement mon mobile. SMS d’Antoine. « Tu peux rester à Sartrouville. J’ai envie d’rester seul ». Ha ????? J’me sens tout à coup un peu conne. J’appelle Antoine. Tout devient confus. Ok, je reste à Sartrouville, j’appelle pour prévenir de mon changement d’avis. Allo !!! Messagerie. Messagerie. Messagerie. J’descends, j’remonte l’escalator en panne. Le ciel est toujours gris. Qu’est ce que j’fais là ? J’me sens seule. Très seule. Abandonnée, mais comme si j’l’avais décidé… MOI. J’appelle Antoine. « J’rentre ».
Les bras chargés d’assiettes en carton dans des sacs en plastique, j’monte dans l’train. Les larmes rendent le brouillard épais. J’veux plus voir. Plus entendre. Plus sentir.

J’suis née aujourd’hui, il y a 50 ans. Premier regard. Fusillé. Premier mot. Interdit. Premier geste. Blindé. Là, maintenant, à quelques heures de vie, sur un strapontin d’banlieue, mon regard s’évanouit.

La défense. Je descends. Escalator. Je monte. Le plafond semble bas. Noir. Ecrasant. Pesant. Je sens intellectuellement les gens autour de moi, je me sens intouchable. Inaccessible. CHOC. Je me suis interdit un moment d’plaisir en refusant l’invitation de rester à Sartrouville. PLAISIR INTERDIT. En décidant d’rentrer, j’interdis Antoine d’être lui, d’être libre. Auréolée du pouvoir sacré, j’lui interdis l’accès au féminin. Mère castratrice inconsciente je suis. Je m’effondre. « Putain de bordel de merde » C’est vraiment pervers. Sur le quai d’la gare, la rage monte. « Putain » d’inconscience. Sur le quai d’la gare, seule, au milieu d’une foule de parents qui rentrent chez eux, j’imagine les miens. Le jugement facile, le verbe statufiant, le regard tétanisant, l’inconscience de la conscience, le rejet de ma naissance, l’oubli de mon existence…

Le train est à quai. J’monte. La défense. St Cloud… J’arrive. « Bonsoir Antoine ». Deux mots. La soirée est terminée. C’est clair, évident. Sous mes apparences de maman faussement decontractée, très à l'ecoute, habitée de la non envie de reproduire le shéma éducatif de mes parents... je l'etouffe.
J’vais compenser par la clope, le thé. J’me gorge. Je gonfle. J’ me vois, j’ me sens. C’est délirant. Impossible d’arrêter. Je bois. Je fume. J’ai la nausée. Pouacre !!!. Ca m’oppresse. j’continue. Thé. Clope. J’me lève. Envie d’bouger. Thé. Clope. J’en peu plus. Corps cigard. Carbonisée. Fait chier !!!. J’vais m’coucher…

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